Renforcement du plan pour la prévention des accidents du travail graves et mortels

Paru dans #MagCAPIDF, septembre 2024

Renforcement du plan pour la prévention des accidents du travail graves et mortels

par François Hubert, avocat spécialisé en droit social, cabinet Voltaire avocats

Si une baisse importante du nombre des accidents graves et mortels a été enregistrée ces dernières décennies, un plancher semble cependant avoir été atteint depuis 2010. Ainsi, en 2021, près de 640 000 accidents du travail ont été déclarés, dont près de 700 décès, et en 2022, 559 812 accidents du travail ont été recensés, dont 789 mortels[1].

Certains secteurs d’activité sont plus exposés à ce type d’accident (en particulier la construction, l’agriculture, les industries extractives, le transport et l’entreposage) et des profils, tels que les jeunes embauchés, sont plus vulnérables face à de tels accidents, sachant que la nature et les causes de ces derniers peuvent être multiples (chute de hauteur, accident de la route ou en lien avec l’utilisation d’une machine, etc.).

Pour diminuer le nombre et la gravité de ces accidents, les pouvoirs publics ont notamment diffusé en 2022 un plan pour la prévention des accidents du travail graves et mortels, établi avec les partenaires sociaux, la sécurité sociale et les organismes de prévention, et visant à :

  • Mettre en place des actions de sensibilisation et de formation, notamment à destination des travailleurs intérimaires ;
  • Renforcer les mesures de prévention, en particulier la surveillance du marché des équipements de protection et de sécurité ;
  • Promouvoir le dialogue social et développer des outils de connaissance et de suivi des accidents du travail graves et mortels, pour mieux cibler les actions vers les secteurs et métiers les plus à risque.

Ce plan a été complété en avril 2024 de onze mesures, dont les suivantes :

  • Mieux informer et outiller les lycées professionnels sur les enjeux de la santé et la sécurité au travail et protéger davantage les nouveaux embauchés sur le terrain (exemple : recourir au port d’un équipement de protection individuelle de couleur distincte, à l’instar du macaron d’identification du jeune conducteur) ;
  • Renforcer la mobilisation de la branche de l’intérim et des salariés détachés en faveur de la santé et de la sécurité (exemple : renforcer le rôle du salarié compétent, désigné à l’article L. 4644-1 du Code du travail, qui s’occupe des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l’entreprise et qui pourrait s’occuper de l’accueil et du suivi des conditions de travail des salariés détachés) ;
  • Mieux mobiliser les services de prévention et de santé au travail dans l’accompagnement des entreprises pour la réalisation et l’actualisation du document unique d’évaluation des risques professionnels (exemple : renforcer les outils à destination des TPE et PME pour faciliter l’évaluation des risques et le plan d’action en prévention, ainsi que l’accessibilité des aides en vue de soutenir les entreprises dans leurs efforts de prévention) ;
  • Approfondir la connaissance sur les malaises au travail pour mieux les prévenir, ainsi que celle sur les vagues de chaleur et renforcer la prévention de ces risques ;
  • Mieux informer sur les démarches à entreprendre en cas d’accident du travail, notamment mortel, et sur les dispositifs d’accompagnement des victimes, de leur famille et du collectif de travail (un guide à cette fin a depuis été récemment mis à disposition par la Direction générale du travail).

Il s’agit ainsi de sensibiliser davantage les entreprises et les salariés sur la nécessité d’évaluer les risques liés à l’activité professionnelle et de mettre en œuvre et/ou compléter les mesures de prévention et de protection en vue de réduire le nombre et la gravité des accidents du travail.

Ces axes figurant dans le plan de prévention ainsi complété sont des pistes de réflexion et des recommandations et viennent en complément des textes applicables.

À cet égard, en application des articles L. 4121-1 et suivants du Code du travail, l’employeur est tenu à une obligation de sécurité à l’égard de ses salariés.

Ainsi, en cas de survenance d’un accident du travail, il peut voir engager, sous conditions, sa responsabilité civile, notamment devant le juge prud’homal (exemple : pour manquement à l’obligation de sécurité), voire sa responsabilité pénale (exemple : pour manquement aux règles de sécurité, voire pour blessures ou homicide involontaires).

De même, le salarié doit « prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail », en application de l’article L. 4122-1 du Code du travail, et, en cas manquement à cette obligation, peut s’exposer à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement, et, le cas échéant, à des poursuites pénales.

Pour les entreprises et les salariés, il convient donc de s’emparer de ce sujet, ce d’autant plus que les inspections du travail ont fait de la prévention des accidents du travail leur thème de campagne pour l’année 2024.

Ainsi, ces dernières peuvent procéder à des contrôles en vue de veiller à ce que les mesures de prévention soient connues et identifiées par les employeurs et les mesures de protection des salariés mises en place, et, dans ce cadre, peuvent faire sanctionner les comportements fautifs constatés.

[1] https://travail-emploi.gouv.fr/sante-au-travail/plans-gouvernementaux-sante-au-travail/article/plan-pour-la-prevention-des-accidents-du-travail-graves-et-mortels

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