« Sur les 4 départements franciliens en tension, l’offre privée représente plus de 50 % des prises en charge » Patrick Serrière, FHP Île-de-France

Paru dans #MagCAPIDF, décembre 2024

Entretien avec Patrick Serrière, président de la Fédération de l’Hospitalisation Privée (FHP) Île-de-France

Quelles sont les spécificités du secteur hospitalier francilien ?

Les 210 cliniques et hôpitaux privés d’Île-de-France offrent un accès à des soins de proximité et de qualité réalisant 30 % de l’activité hospitalière. Nos services couvrent plus de la moitié des séjours chirurgicaux, 45 % des séjours de soins de SMR (soins médicaux de réadaptation), 30 % de la chirurgie cancérologique et 25 % des séjours en psychiatrie. Nos établissements sont des acteurs majeurs de l’offre de soins, y compris dans certains territoires défavorisés. À titre d’exemple, sur les 4 départements franciliens en tension (Essonne, Seine-Saint-Denis, Val-d’Oise, Yvelines…) l’offre MCO (médecine, chirurgie et obstétrique) privée représente plus de 50 % des prises en charge. Les récentes périodes de tension dans l’offre de soin (durant l’épidémie du Covid-19, lors de difficultés des ressources humaines et pendant les JOP Paris 2024) montrent l’engagement des établissements de la FHP IDF qui prennent toute leur part, voire sont même davantage mobilisés. Ainsi, durant la crise du Covid-19, les établissements franciliens ont augmenté leur capacité et ont pris en charge 25 % des patients en soins critiques.

« sur les 4 départements franciliens en tension (Essonne, Seine-Saint-Denis, Val-d’Oise, Yvelines…) l’offre privée représente plus de 50 % des prises en charge. »

Dans un contexte budgétaire très contraint, comment être plus efficient tout en améliorant l’accès aux soins et la prise en charge des patients ?

En raison d’un financement ne tenant que très partiellement compte de l’inflation depuis 2021, 40 % des hôpitaux privés étaient déficitaires en 2023 et les prévisions tablent sur 60 % en 2024. Dans ce contexte, les établissements de santé cherchent à mettre en œuvre des prises en charge plus efficientes, en développant des parcours innovants tout en conservant la même qualité de soins. L’autre levier d’efficience consiste à ouvrir l’établissement vers la ville pour promouvoir certaines filières comme l’hospitalisation à domicile. Tous les établissements s’inscrivent désormais dans un maillage territorial et sont en lien avec des Communautés professionnelles de territoires en plein développement ou des dispositifs d’appui à la coordination. L’objectif est bien de coopérer avec l’ensemble des acteurs du territoire au service du patient.

« 40 % des hôpitaux privés étaient déficitaires en 2023 et les prévisions tablent sur 60 % en 2024. »

Comment le secteur privé entend-il assurer l’attractivité des métiers de la santé pour répondre aux pénuries de professionnels ?

À l’instar des autres professions, les cliniques et hôpitaux privés font face à d’importantes difficultés de recrutement de pharmaciens, d’infirmiers, de masseurs-kinésithérapeutes, d’aides-soignants, qui pénalisent l’accès aux soins sur les territoires. Pourtant, le secteur sanitaire constitue un gisement d’emplois, à forte valeur ajoutée, susceptible de répondre aux attentes des jeunes générations. Au quotidien, les organisations dans les établissements de la FHP sont agiles. Les responsables des services forment et accompagnent les jeunes diplômés dans leur prise de poste. La FHP Île-de-France participe aussi à des évènements pour promouvoir ces métiers, comme « Ma clinique est fantastique » qui contribue à mieux faire connaitre au public le secteur, à travers plusieurs manifestations au sein des hôpitaux privés franciliens.

Malgré un engagement reconnu, les professionnels du secteur privé connaissent de nombreuses asymétries de traitement par rapport à leurs homologues du secteur public. Quelles sont vos propositions pour y remédier ?

Nous portons la conviction que l’accès aux soins passe par la reconnaissance de tous les professionnels de santé qui remplissent les mêmes missions, quel que soit le statut de leur lieu d’exercice. Les difficultés de recrutement des professionnels de santé sont amplifiées par les écarts de salaire entre public et privé qui n’ont cessé de se creuser au détriment du secteur privé et par un manque de reconnaissance des missions accomplies. En janvier 2024, à structure d’ancienneté identique, l’écart salarial net moyen entre les secteurs public et privé était de 19 % pour les infirmiers et de 32 % pour les aides-soignants. La situation économique ne permet pas aux hôpitaux privés, financés à plus de 90 % par l’assurance maladie, de mettre en place les revalorisations salariales pour les professionnels de santé.La réponse doit être duale : un indispensable accompagnement financier de l’État à la politique salariale, au bénéfice de nos professionnels ; et une priorisation des enjeux d’emploi,de formation et d’attractivité des métiers de la santé, prérequis à la coopération entre les acteurs et à la réponse aux besoins de santé.

Comment répondre aux conséquences du vieillissement de la population sur le système de santé ?

La prise en charge dans de bonnes conditions de nos aînés est le défi majeur des prochaines années. Les cliniques et hôpitaux privés franciliens y sont déjà pleinement engagés et travaillent sur l’amélioration des parcours avec la mise en place d’accès plus directs pour éviter des attentes tant dans les services d’urgences déjà en tension que dans les services de médecine. Les établissements de soins médicaux de réadaptation sont aussi mobilisés dans la promotion de la prévention en mettant en place des programmes pour réduire l’incidence des maladies chroniques notamment. La réussite d’un tel défi ne pourra se faire qu’en renforçant la collaboration entre les acteurs de santé qui a déjà montré ses effets vertueux lors de récentes périodes de tensions.

→ fhp.fr/la-federation/les-fhp-regions/ile-de-france/

 

 

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